jeudi 9 février 2012

07.02.2012


Je suis assise dans notre bistrot, celui où l’on s’est embrassé pour la première fois, celui où on a passé le plus de temps.

Je ne suis pas assise à « notre » table. La 3ème en entrant à gauche, contre le mur, la table ronde avec le banc en demi-cercle et les deux chaises. Non je suis assise en face de celle-ci, qui est vide, et je nous regarde. Je me souviens de ce soir là. L’extérieur du bistrot a un peu changé mais à l’intérieur tout est pareil. Abominablement pareil. Tout change, tous les souvenirs que j’ai sont brouillés par cette ville qui change constamment. Mais ce bistrot ne change pas. La disposition est pareille, les murs sont jaunes, les tableaux pop’art sont toujours à leur place.

Les bières au whisky ont été remplacées par un chocolat chaud. J’ai toujours les cheveux rouges (un peu plus qu’avant), j’ai pris du poids, mon vernis à ongle est toujours noir, j’ai toujours des docs aux pieds, le vieux discman a été remplacé par un iPod 160 GO (je n’ai plus besoin de me trimballer un sac à dos supplémentaire pour mes cds), j’ai arrêté de fumer.

Et je t’aime toujours.

On était ici l’hiver, au début  de l’hiver, par des froids glacials, on arrivait dans ce bistrot et on commandait des bières, on avait Falco et Jamie, sagement couchés au pied la table, et on avait des étoiles plein les yeux.
Ce soir c’est pareil, mais je cherche les étoiles dans mes larmes.

A la table où je suis assise, je me souviens qu’un  de tes amis sdf avait voulu nous payer des bières s’il pouvait dormir chez toi ensuite. Les bières finies, on avait changé d’avis. Il s’est retrouvé seul, sans fric et sans toit. Avec le recul, je me dis qu’on avait été des gros salauds. Il l’a mal pris d’ailleurs, et c’est la seule fois où on s’est fait foutre dehors de ce bistrot.

La table d’à côté, c’était notre deuxième rendez-vous en amoureux. Tu m’avais fait découvrir Néophyte. Je les écoute toujours. 

L’autre table plus loin, c’est celle où on avait passé la Saint Nicolas, à boire des sous-marins et manger des cacahuètes et mandarines. Ah oui ! Il y avait les bières de Noël aussi ! J’avais reçu de l’argent et on a profité. On avait inventé des jeux de mots débiles, mais je m’en souviens plus.

On était cons et inconscients mais ça aurait pu s’arranger avec le temps. Je suis moins inconsciente maintenant en tout cas.

Parfois je fais des listes de tout ce que j’aurais à te raconter si tu revenais. J’en ai jamais terminée une seule.

Tu sais, avec leur nouvelle terrasse, on aurait pu se barrer par la fenêtre sans payer très facilement.

Il y a aussi l’autre table, celle où j’ai revu ta maman après ta mort pour qu’elle me donne un sac avec un de tes pulls (le blanc et noir en laine), mes cds et des cds à toi. Il y avait aussi le foulard que je t’avais offert à Noël. Elle était dévastée, Matt. Je sais pas comment elle va à présent, je suis désolée. Je l’ai croisée le 22 décembre 2003 la dernière fois. Elle m’a juste dit « Ca fait six mois aujourd’hui ». Six mois depuis l’enterrement, j’avais pas compris tout de suite, j’avais pas compté. J’avais arrêté de compter. Tu sais quoi ? Je vais leur écrire, prendre des nouvelles. Je sais pas quand, pas pour ton anniversaire, ça ferait  un peu cliché. Je sais pas. Je voudrais leur demander des photos aussi, même si je me sens un peu mal de le demander après 7 ans et demi.

Déjà 7 ans et demi. Souvent, j’essaie d’imaginer ce qu’on serait devenus si tu étais encore là. Je me rends compte aussi que je t’ai dépassé, tu n’auras jamais plus de 21 ans. À l’époque, ça me paraissait loin, ça paraissait adulte. Maintenant que j’en ai bientôt 25, je me sens pourtant pas beaucoup plus adulte.

Tout passe si vite et tout s’efface. Parfois j’ai l’impression que j’oublie ton visage, alors je regarde des photos de ta sœur que j’ai trouvées sur son profil facebook (à propos, tu es devenu tonton d’une petite fille et d’un petit garçon) et je zoome sur ses yeux. Vous avez le même regard. Et parfois, je sens que le souvenir de ta voix s’efface, et c’est une grande angoisse qui s’empare de moi. Alors je vais commencer à revenir sur les lieux qu’on fréquentait. Le Grand Place, le Nouveau Monde et le squat (ce qu’il en reste), … je commence ce soir avec notre bistrot. C’est logique, c’est notre point de départ. Ou presque.

J’ai l’impression de devoir faire la paix avec ces lieux. 

mardi 20 décembre 2011

Âmes perdues - Poppy Z. Brite


Résumé: A 15 ans, Nothing décide de quitter la maison pour partir à la recherche de ses origines. Il croise la route de Zillah, Molochai et Twig, des créatures maléfiques et cruelles buvant du sang. En parallèle il y a la vie de Steve et Ghost, membres du groupe de punk Lost Souls. 

Extraits: Le matin les trouva tous étendus sur le matelas, les jambes emmêlées, le visage enfoui dans les cheveux d'un autre, coeur contre dos, main dans l main. Zillah s'étira et marmonna lorsque le soleil lui caressa les paupières - ultime vestige d'un réflexe ancestral dont il se souvenait à peine, même dans ses cauchemars.

Un torrent de sang se déversa sur le visage de Nothing, tomba dans sa bouche en bouillonnant. Comparé au sang qu'il avait déjà pu siroter, le goût en était aussi différent que celui du whisky comparé à celui de l'eau. C'était le goût de la vie, l'essence même de la vie. Et c'était en fait une vie qu'il était en train de boire, d'engloutir. Il se sentit emporté par les convulsions frénétiques et absurdes du corps sur lequel il était couché et par les guitares rugissantes des araignées marsiennes.

Mon avis: Je m'attaque enfin à un livre de Poppy Z.Brite, qu'on me recommandait si souvent.

Il est extrêmement difficile de décrire ce qui se passe dans ce roman finalement pas aussi choquant que ce à quoi je m'attendais. L'atmosphère est sombre et les mots de Poppy Z. Brite ne laissent aucune place à l'espoir. Au fur et à mesure de notre lecture, on se sent oppressé par l'ambiance malsaine qui règne du début à la fin et qui vient écraser les derniers soupçons d'innocence que le personnage de Nothing garde.

Sanglant. Pesant. Lancinant. Planant.

Le livre prend des allures de road movie au rythme pesant, comme un riff lourd qui vient vous assommer par sa lourdeur. Des notes lentes mais assourdissantes et puissantes qui vous labourent le cerveau.

J'ai particulièrement aimé les personnages. Le charismatique Zillah, vicieux et malfaisant jusqu'à l'os, accompagné de Twig et Molochai, ses deux compères. Ces trois-là sont unis pour répandre le mal. Ils sont d'étranges et maléfiques créatures buvant du sang. Je les ai davantage considérés comme le mal incarné plutôt que comme des simples vampires. Et il y a Christian, qui semble être le seul encore doté d'une conscience. J'ai apprécié que les caractéristiques des vampires soient redéfinies et que les mythes vampiriques soient brisés. 

Souillé. Impur.

Nothing évoque l'adolescent typique, mal dans sa peau et en quête d'identité. Il fugue pour obtenir des réponses et se retrouve mêlé aux vampires. 

Et enfin il y a Steve et Ghost, deux amis humains que rien ne peut séparer et qui jouent dans un groupe de rock appelé Lost Soul. 
Ghost, si sensible et doté de dons de medium.
Steve, si paumé et adepte de l'alcool.

Insalubre. Infect. Sombre. Fétide.

Leurs routes à tous vont se rapprocher, se croiser, s'éloigner. Poppy Z. Brite s'est vraiment inspirée de la Nouvelle Orléans pour décrire les différents lieux de l'histoire, et ça se sent. Les ruelles du Vieux Carré s'étalent et s'érigent dans mon imagination à la lecture du livre. Les images de ces lieux se forment sans peine dans ma tête, et elles puent le sang, le sexe et la bière.



Au final on se retrouve là avec 500 pages et peu de rebondissements (quand je disais au début qu'il est extrêmement difficile de décrire ce qui se passe dans ce roman...) . Mais ce n'est pas tant les événements que j'ai trouvés importants dans Âmes Perdues. C'est de s'imprégner des personnages et des lieux, c'est de se plonger dans les ambiances malsaines et finir avec le souvenir du goût de fer si particulier du sang dans la bouche...


lundi 5 décembre 2011

Lady, ma vie de chienne - Melvin Burgess



Résumé:
Sandra, 17 ans, en a franchement marre de devoir plaire à tout le monde. Entre ses résultats à l'école, sa meilleure amie qui ne la comprend plus et les disputes avec ses parents, elle a choisi: elle veut s'amuser et profiter. Elle enchaîne les garçons et les verres jusqu'au jour où un clochard la transforme en chienne.


Elle doit désormais s'adapter à sa nouvelle vie, dictée par son instinct, accompagnée par ses nouveaux amis à quatre pattes.


Extrait: Je pensais à propos de tout. Des gens, aussi. de mon père qui me proposait souvent de venir le voir aux Etats-Unis. Et lui, il ne pouvait pas venir? De ma mère, avec qui je m'entendais mal, d'Adam qui était chiant, de l'école où je m'ennuyais, d'Annie, de Simon. Chacun voulait que je corresponde à l'image qu'il se faisait de moi, vous comprenez? Annie voulait travailler davantage parce que les examens blancs approchaient. Simon voulait me voir plus souvent. maman disait que je sortais trop. Vous voyez? Ces gens qui étaient censés êtres mes proches voulaient tous que je sois quelqu'un d'autre. J'en avais marre.

Mon avis:
Sous ses airs humoristiques, ce livre cache en fait le portrait de notre société vue par une adolescente.

Davantage qu'une énième histoire de famille, ce livre est une critique de la société, montrant bien l'impossibilité de certains adolescent à se projeter dans un monde d'adultes qui ne leur offre rien d'attrayant. 


Que choisir entre une vie de de chienne sans soucis du lendemain ni responsabilités et sa vie de fille où elle doit plaire à ses parents, avoir de bons résultats à l'école, gérer ses petits copains et faire ce qu'on lui dit?



Hell'come!

Bienvenue sur mon blog!


Je vais essayer de le soigner celui-là, parce qu'en général je les abandonne tous après quelques jours. Et comme son nom ne l'indique pas, je vais écrire mes chroniques de livres ici.